COUPLER LES DYNAMIQUES DE L'ÉCONOMIE ET DU CLIMAT
La dynamique du climat se déroule sur une très longue période, celle de l’économie est beaucoup plus brève. Les émissions de gaz à effet de serre (GES) qui sont associées à la croissance économique depuis le milieu du 20ème siècle vont affecter le climat sur un très long avenir. On opère ainsi à deux échelles de temps très différentes. L’évolution du climat est étudiée à l’aide de modèles dynamiques de très grande échelle qui sont ensuite intégrés pas à pas sur de très longs horizons temporels pour simuler les interactions entre océans, banquises, terres émergées, nuages et aérosols qui définissent, en fin de compte, la sensibilité du climat aux modifications de concentration de GES dans l’atmosphère. La croissance économique est étudiée à partir de modèles d’équilibre économiques permettant d’évaluer l’augmentation de bien-être de la population du fait de l’accroissement de la capacité de production des économies. Ces modèles économiques sont beaucoup plus simples et faciles à utiliser que ceux qui traitent du climat. On peut coupler ces deux dynamiques en calculant les émissions de GES liées à l’utilisation d’énergies fossiles dans la production des biens économiques et en utilisant ces profils d’émission comme forçage des modèles climatiques, afin d’en déduire les augmentations de température à anticiper. Ces augmentations de températures vont entrainer des dommages qui seront pris en compte dans les modèles économiques. On obtient ainsi des modélisations intégrées du climat et de l’économie. Des techniques d’optimisation permettent de construire des scénarios de politique climatiques efficaces.
Un dialogue entre Oracles
Les créateurs d’ORDECSYS maîtrisaient les techniques d’optimisation de grande dimension et de couplage entre modèles d’échelles de temps et d’espace très différentes. Ces méthodes ont été appliquées avec succès pour contribuer à l’étude de l’économie du changement climatique. Elles consistent à établir un dialogue entre deux « oracles », l’un décrivant le système économique mondial, l’autre le système climatique. Chaque oracle est un modèle mathématique ayant une complexité propre, avec des échelles de temps et d’espace très différentes. Les deux oracles « communiquent » en échangeant des informations contenues dans des « variables de couplage ». L’oracle « Économie » proposera un profil d’émissions et l’oracle « Climat » répondra en fournissant un profil d’augmentation de température résultat du cycle du carbone et de l’augmentation de la concentration en GES. Cette augmentation de température affectera l’économie en causant des dommages qui seront pris en compte dans une approche coût-bénéfice.
Références
- Beltran C., L. Drouet, N. R. Edwards, A. Haurie, J.-P. Vial and D. S. Zachary, An Oracle Method to Couple Climate and Economic Dynamics, Chap. 3 in A. Haurie and L. Viguier (eds.), The Coupling of Climate and Economic Dynamics, Springer, 2005.
- Drouet, L., Edwards, N. R. and Haurie, A. Coupling climate and economic models in a cost-benefit framework: A convex optimisation approach. Environmental Modeling and Assessment, 11, 2 (2006).
- Bahn, O. and Drouet, L and Edwards, N.R. and Haurie, A. and Knutti, R., Kypreos, S., Stocker, T.F. and Vial, J.-P., (2006), The coupling of optimal economic growth and climate dynamics, Climatic Change, Volume 79, Numbers 1-2 /, pp. 103-119, November, 2006.
- Drouet L., Haurie A., Moresino F., Vial J.-P., Vielle M. and Viguier L., An oracle based method to compute a coupled equilibrium in a model of international climate policy, Computational Management Science, Vol. 5 (1–2) pp. 119-140, 2008.
Résultats
Les graphiques ci-dessous, résument les résultats du couplage entre DICE-99, oracle « Économie » et C-Goldstein, un modèle du climat 3D de complexité moyenne. L’approche coût-bénéfice utilise la représentation des dommages fournie par DICE-99. L’horizon temporel est de 400 ans. On voit que l’optimisation couplée des deux modèles donne des résultats qui diffèrent de ceux obtenus avec DICE-99 seul. On retrouve cependant une hausse des températures de près de 2oC à la fin du 21ème siècle et qui montera jusqu’à 3 oC lors des siècles suivants.